Monday, December 31, 2007

Mère indigne sur la corde raide (une fiction dindo-masochiste)

Mère indigne -- C'est super que tu aies pu te libérer pour venir prendre un café à la maison. Avec les fêtes de famille, et tout...

Copine indigne -- Je me suis dit que, comme t'étais toute seule avec les deux petites...

MI -- M'en parle pas. Je suis au bord du précipice mental. Je reçois la famille avec de la dinde ce soir, et Père indigne a décidé de prendre une petite journée de vacances. "Mais on EST en vacances, chéri", que je lui ai dit.

CI -- Un argument de taille. Mais il est parti quand même?

MI -- Ouais, ben c'est parce que moi, je m'en suis pris deux jours de vacances, depuis le début des vacances.

CI -- T'as brûlé tes cartouches, ma vieille. Moi, je suis plus maligne. Je triche.

MI -- Comment ça?

CI -- Ben, je dis que j'ai des courses urgentes à faire, et ensuite, au lieu de rentrer, je vais prendre un café chez une copine accueillante...

MI -- Wouah! T'es géniale. Je me demande si je pourrais partir comme ça un après-midi et faire un voyage au Mexique en catimini? J'essaie de convaincre Père indigne d'acheter un forfait, mais il tient à ce qu'on attende d'avoir remboursé les dépenses des Fêtes. Dieu sait pourquoi.

CI -- Oui, bon, c'est pas tout ça, le soleil et la plage. J'ai quelque chose d'encore plus intéressant à te montrer.

Copine indigne met sous le nez de Mère indigne un petit sac de plastique.

MI -- Fabricville? Tu t'es mise à la couture?

CI -- Non. Je... Enfin... J'ai acheté de la corde.

MI -- T'es sérieuse? T'en as pas mal? Je suis justement en manque de ficelle pour la dinde de ce soir...

CI -- Non, non. Ce n'est pas pour de l'alimentaire.

MI -- Mon Dieu... Tes enfants sont si insupportables?

CI -- Mais non! Pas pour les enfants, franchement! C'est Copain indigne qui... enfin, il veut expérimenter.

MI -- Expé... Non.

CI -- Voui.

MI -- Attends. Attends. Je suis sous le choc.

CI -- Ben là, tu m'énerves. T'en as pas, toi, des fantasmes?

MI -- Partir au Mexique?

CI -- Je parle de vrais fantasmes. De trucs qui impliqueraient des pompiers et des tuyaux, des dompteurs et des tigresses sauvages, des cowboys et des lassos, Dora et Chippeur, ce genre de truc...

MI -- Ben, une fois, j'ai proposé à Père indigne de jouer à la Belle au Bois Dormant. Moi, j'aurais été la Belle, endormie...

CI -- Et Père indigne aurait été le Prince charmant qui t'aurait éveillé d'un doux baiser sur la--

MI -- Non, non, justement! Père indigne aurait été un malappris qui se serait introduit par effraction dans le château et aurait profité, tsé veut dire genre, de la Belle, sans que jamais elle ne se réveille!

CI -- ...

MI -- Tu comprends? Elle ne se réveille pas, parce que c'est pas le vrai Prince!

CI -- ...

MI -- J'étais crevée ce soir là.

CI -- Bon. En tout cas. T'essaieras d'aller acheter pour 90 pieds de corde--

MI -- Quatre-vingt-dix pieds??

CI -- C'est beaucoup, mais on sait jamais... En tout cas, quand la vendeuse m'a demandé si elle pouvait me conseiller, j'ai complètement figé.

MI -- T'aurais dû lui dire que c'était pour ficeler une belle grosse dindonne...

CI -- Ah, ah, ah. J'ai dit que c'était pour ma fille, pour un jeu de cour de récré...

MI -- La tag-bisou, sauf qu'on ne peut pas courir, on sautille?

CI -- T'es conne. En tout cas, je lui ai dit que j'en prenais beaucoup parce que comme ça, Fifille en aurait pour plus longtemps et je ne devrais pas revenir à tout bout de champ. Elle m'a dit que c'était dommage, que si je prenais une carte Élite Cliente Fidèle, j'aurais déjà un rabais de 20% sur mon achat.

MI -- Laisse-moi deviner.

CI -- Ben oui, j'ai pris la carte.

MI -- 20% sur 90 pieds, ça a dû valoir la peine.

CI -- Surtout qu'en fait, la vendeuse m'a conseillé d'en prendre plus, de plusieurs couleurs. Paraît que les jeunes aiment ça, les couleurs. Alors j'ai pris 30 pieds de plus, en vert.

MI -- Oh, boy. Ça va être joli, ce soir. T'as aussi pensé à utiliser les lumières du sapin?

CI -- Ça va, hein, la Belle au Bois Dormant. Au lieu de te moquer, tu devrais en prendre de la graine...

MI -- Oui, mais ça ne te fais pas un peu peur, quand même? De la corde? Verte?

CI -- Copain indigne m'a dit--

MI -- Je sais! Il t'a dit: "T'inquiète pas chérie, c'est nouveau alors ça va juste durer cinq minutes"?

CI -- Pfff. Non, il a dit: "Sois courageuse. Tu n'auras qu'à fermer les yeux, ça ne fera pas mal, je te le promets."

MI -- Je suis rassurée...

CI et MI sirotent leur café, pensives. Puis:

MI -- Sérieusement, 120 pieds de cordes... Je peux te demander un service...?

*** PLUSIEURS HEURES PLUS TARD. LES INVITÉS SONT VENUS, PUIS REPARTIS. MÈRE INDIGNE ET PÈRE INDIGNE SE METTENT AU LIT... ***

Père indigne -- En tout cas, la dinde, bravo.

Mère indigne -- Tu as aimé? Vraiment?

Père indigne -- Qu'est-ce qu'on pouvait ne pas aimer? La corde en nylon vert, les noeuds coulants autour des pattes, la poitrine et les cuisses expertement ficelés...

Mère indigne -- C'était joli, hein? J'ai potassé mes noeuds sur Internet, et j'ai pratiqué tout l'après-midi.

Père indigne -- Dommage que ça ait déteint.

Mère indigne -- C'est pour ça que je l'ai servie un peu sous la salade. Pour camoufler.

Père indigne -- Hum.

Mère indigne -- Écoute, je suis contente que tu aies aimé la corde verte. Regarde... Il en reste...

Père indigne -- Mon Dieu... Les filles ne sont pourtant pas si insupportables...

Mère indigne -- Pas pour les filles, franchement. Pour nous. Pour expérimenter.

Père indigne -- Expé... Non.

Mère indigne -- Voui. Allez, laisse-toi faire, mon amour. Et hop! Un petit noeud par ci, un autre par là... Ne t'inquiète pas, je ne vais pas m'endormir en te laissant comme ça...

Père indigne, dûment immobilisé -- Et maintenant, quoi?

Mère indigne -- Maintenant, je sors mon ordinateur... Je fais une recherche avec "vacances destination soleil Mexique"... Ahahahaha! Je vais nous réserver un forfait, et tu ne peux rien faire pour m'en empêcher!

Père indigne -- NON!

Mère indigne -- Allez chéri, sois courageux. Tu n'as qu'à fermer les yeux, ça ne fera pas mal, je te le promets...

Tuesday, December 18, 2007

Appétit de destruction (une fiction cathartique)

(Un billet bête et méchant -- pour Noël, vous n'en méritiez pas moins!)

***

Mère indigne -- Tu sais, d'habitude, je suis une assez bonne mère.

Maman copine -- Hum...

Mère indigne -- Non, mais, sérieusement, en général, je suis assez, disons, émerveillée par mes rejetons et encline à faire naître la joie dans leur coeur. Genre.

Maman copine -- Mais...?

Mère indigne -- Mais... des fois, j'ai comme des mauvaises impulsions.

Maman copine -- Pire que d'habitude? Tu me fais peur.

Mère indigne -- Je te donne un exemple. Bébé. Elle a été à l'hôpital l'autre jour, et depuis ce temps-là, à chaque fois que je dis le mot "docteur", c'est la crise.

Maman copine -- Oui, mais c'est pas comme si tu faisais exprès pour le dire.

Mère indigne -- C'est que...

Maman copine -- Tu fais pas exprès, quand même?

Mère indigne -- Ben... C'est comme une expérience, tu vois? Je... j'ai comme envie de tester. Pour voir si ça marche vraiment à tout coup. Ou si elle se désensibilise, genre. Alors quand elle me dit "Faut pas toooomber, faut pas tooomber", je réponds "Non, hein, faut pas se faire des gros bobos sinon on va être obligés aller voir le DOCTEUR". Et pis là, ça y est. Elle pleure.

Maman copine -- Pas encore désensibilisée.

Mère indigne -- Non.

Maman copine -- (Soupir.) Tu fais dur.

Mère indigne -- Non mais, ça ne t'arrive jamais, à toi, de vouloir être méchante? D'avoir le goût de faire une télé-réalité pour les 3-4 ans avec le Père Noël qui enlève sa barbe? D'avoir l'impulsion de dire à ta fille qu'il reste plus de bonbons d'Halloween, pas parce qu'elle les a déjà tous mangés, non, mais parce que tu as jeté son sac encore plein aux poubelles?

Maman copine -- ...

Mère indigne, s'enflammant -- Tu n'as jamais eu le goût de... de détruire le bonheur?

Maman copine -- Je m'excuse, mais non.

Mère indigne -- Bizarre.

Fille Aînée s'approche sur ces entrefaites.

Fille Aînée -- Maman, est-ce que je peux prendre une figurine de Père Noël en chocolat pour dessert?

Mère indigne -- Oui, à condition que tu en donnes un petit bout à ta soeur.

Fille Aînée, regardant quel serait le plus petit bout possible à partager -- Son chapeau, par exemple?

Mère indigne -- Tu fais comme tu veux, mais tu partages.

Et Fille Aînée de commencer à essayer de détacher le plus délicatement possible le chapeau du Père Noël, question d'abîmer le moins possible la belle figure du gros bonhomme qui n'existe même pas dans la vraie vie.

Mère indigne, en apparté à Maman copine -- Tu vois, ÇA, ça... ça m'ÉNERVE. La voir en train de gosser sur son Père Noël pour ne pas le briser, alors qu'elle va finir par le manger de toute façon dans les dix prochaines minutes... Moi, là, MOI, je lui foutrais mon poing sur la GUEULE, au Père Noël. KAPLANG! Plein de morceaux partout. Après, on le partage avec tout le monde pis on n'en parle plus, cibole!

Maman copine -- Tu t'énerves pour rien. Je suis sûre que tu faisais la même chose avec tes figurines en chocolat quand tu étais petite.

Mère indigne -- Ben oui, je faisais la même chose. J'étais STUPIDE.

Maman copine -- Cal-me-toi. Tout-va-bien. Ta fille va se débrouiller et tu n'en entendras même plus parl--

Fille Aînée -- Maman, maman, j'arrive pas à séparer le chapeau du reste du Père Noël. Veux-tu m'aider?

Mère indigne, suave -- Mais ouiii. Bien sûûûr, ma chériiie. Allez, donne-moi cette figurine.

KAPLANG!

Fille Aînée et Copine maman -- Nooon!

Mère indigne, un large sourire aux lèvres -- Voilà! On va pouvoir partager le chocolat avec tout le monde et on n'en parle plus!

Fille Aînée ramasse les morceaux de chocolat en tremblotant pendant que Bébé, flairant l'aubaine, s'approche discrètement de la table.

Maman copine -- Franchement! C'est nul, ce que tu viens de faire. Faut vraiment être malade.

Mère indigne -- Malade? Alors d'après toi, il faudrait que j'aille voir le DOCTEUR?

Bébé -- OUIIIIIIIIIIIN!!!

Mère indigne, d'excellente humeur -- Bon, Fille Aînée, amène un autre Père Noël à Maman. Tout le monde ensemble, là, on va faire une belle thérapie.

Sunday, December 16, 2007

On n'apprend pas à une maman singe...

Je sais, je sais.

Cinq longs mois que je vous néglige, et tout à coup, BANG! Un billet. Ne pensez pas que je ne suis pas un peu étourdie moi aussi.

Et un billet... Mon dieu, comment dire? Un billet choquant.

Bon, c'est vrai. Nous sommes sur le Off Indigne, après tout. Il faut s'attendre à être bousculés, ici. Faut aimer l'électrochoc de la maternité gone mad.

Et puis aussi, je vous connais, bande de coquines. On vaque à ses occupations de mère au foyer, on a l'air de ne penser qu'aux purées bio et aux couches à changer, mais dans le fond du soutien-gorge d'allaitement, on ne rêve que d'une chose: parler de sexe! (Attention hein. J'ai bien dit "parler". Parce que "faire", non. Jamais. Hum.)

Alors comme c'est bientôt Noël, je me suis dit, pourquoi ne pas aller leur titiller un peu la glande du Jean-Louis? Mais sans vous parler de Jean-Louis, hein. Oh, que non.

Ne vous inquiétez pas pour Jean-Louis, mesdames. Il va bien. Très bien. Mais entre nous deux, c'est fini. Je n'ai pas eu le choix de rompre: il a offert un slip transparent à Père indigne pour ses 40 ans. Et plus tard, dans l'intimité, Père indigne, au lieu de le brûler (le slip, pas Jean-Louis) sur l'autel de l'hétérosexualité aveugle, a eu l'audace de l'enfiler (le slip, hein, pas...). Le pire fou rire que j'ai eu de ma vie pendant les préliminaires. Ça a failli faire tout rater. Alors voilà. Exit Jean-Louis.

Mais ne dit-on pas "Le roi est mort, vive le roi?" Parce que, Mesdames, il faut que je vous présente Jean-Jules.

Jean-Jules, c'est un vieil ami. Le genre d'ami qui, au lieu de se mettre tranquillement en ménage et de faire des gentils enfants comme le font les gens les plus intelligents de la planète (nous, par exemple), continue à vivre une vie de dégénéré dans un célibat éclaté et jouissif. Euh, je veux dire, un célibat morne et triste, hein. Comme le sont tous les célibats, n'est-ce pas? Ouais, enfin bref. Jean-Jules.

Il se croit très fort, le Jean-Jules, avec ses trente-huit maîtresses dans chaque ville du monde et ses occasionnelles escapades dans des endroits sombres où on peut se faire faire des guilis-guilis par plus de dix doigts à la fois (pour moi qui suis horriblement chatouilleuse, un véritable cauchemar).

Il se croit fort, mais il y en a des bien plus fortes que lui. J'ai nommé: les mères de famille. À preuve, cette conversation que nous avons eue la semaine dernière, chez lui, lors de la pause-lunch d'une réunion de travail. Si si, de travail.

JEAN-JULES, entre deux bouchées de patates pilées -- Tu sais pas quoi, l'autre jour, j'ai parlé à une nana dans un bar. Une habituée des clubs échangistes. Et là...

MÈRE INDIGNE -- Mon dieu! Tu me fais penser. Faut absolument faire la pige pour les échanges de cadeaux de Noël. Ça s'en vient tellement vite. Bordel.

JEAN-JULES -- Allô? Tu m'écoutes? Clubs échangistes?

MÈRE INDIGNE -- Euh... Oui, oui, je... c'est justement ça que je voulais dire par "bordel".

JEAN-JULES -- Ouain. Bon, bref, j'ai parlé avec une nana dont le rêve était de se faire prendre par deux gars en même temps, au même endroit!

MÈRE INDIGNE -- Dans le club échangiste?

JEAN-JULES -- Hein?

MÈRE INDIGNE -- Quand tu dis "au même endroit", tu veux dire, dans le club échangiste?

JEAN-JULES -- (Soupir.) Oui, dans le club échangiste, mais aussi AU MÊME ENDROIT. Même. Endroit.

MÈRE INDIGNE -- Même endroit, même endroit. La zézette, genre?

JEAN-JULES -- La quoi?

MÈRE INDIGNE -- La zézette. C'est le petit mot gentil qu'on a trouvé avec les filles pour dire vag--

JEAN-JULES -- OUI! C'est ÇA. Bravo.

MÈRE INDIGNE -- C'est gagné! We did it! Hourra!

JEAN-JULES -- Euh... oui, c'est ça. You did it. Deux dans un. Peux-tu croire ça?

MÈRE INDIGNE, se resservant de la salade -- Ouais.

JEAN-JULES -- T'as pas l'air impressionnée.

MÈRE INDIGNE -- Ben non. Pourquoi?

JEAN-JULES -- La Terre appelle la Lune? Deux dans un? Même dans les films pornos, j'ai rarement vu ça.

MÈRE INDIGNE, déposant délicatement son couteau au bord de l'assiette -- Écoute, mon petit poussin. Moi, j'ai des BÉBÉS qui sont passés par là. Deux. La madame, elle sait ce que c'est, avoir du gros trafic sur l'autoroute. C'est pas deux baguettes, aussi magiques soient-elles, qui vont épater une parturiente expérimentée.

JEAN-JULES, un peu mélangé entre les métaphores de circulation et de sorcellerie -- Ouais, ouais, bon. Quoi qu'il en soit, cette femme-là, elle m'a aussi dit qu'elle était super soumise.

MÈRE INDIGNE -- Oh. Une soumise de nuit.

JEAN-JULES -- ???

MÈRE INDIGNE -- Soumise de nuit, chemise de nuit... Prrfff... Non? C'est pas drôle? Je suis sûre que Père indigne l'aimerait, pourtant...

JEAN-JULES, les yeux levés vers le ciel -- Si tu pouvais arrêter de niaiser, je pourrais te dire que ce qui la branchait vraiment, mais alors là incroyablement, c'était de se faire mettre la tête dans...

MÈRE INDIGNE, véritablement inquiète -- Pas dans le bol de toilettes?

JEAN-JULES, lâchant sa fourchette -- Dans le...? Ben là, franchement! J'essaie de créer du suspense, moi, et toi tu me parles de bol de toilettes! Comment veux-tu que je dépasse ça? T'es pas très cool.

MÈRE INDIGNE, d'un air désolé -- C'est parce que Bébé a jeté sa poupée dans les toilettes l'autre jour pour lui montrer qui était le vrai patron, et heureusement elle n'a pas tiré la chasse, mais là, la tête de la poupée a rétréci dans la sécheuse et... en tout cas. Ton histoire, ça m'a fait penser à ça.

JEAN-JULES -- ...

MÈRE INDIGNE -- Encore un peu de poulet? Patates pilées?

JEAN-JULES -- Oui. Oui. Merci. (Soupir.) C'était dans un oreiller. Qu'elle voulait mettre sa tête. La fille au bar.

MÈRE INDIGNE -- Ah, bon. C'est vrai que pour le punch, c'est un peu raté. Désolée.

Un silence. Puis:

JEAN-JULES, regardant Mère indigne d'un air sournois -- Tu sais, j'ai toujours pensé que tu ferais une superbe soumise.

Mère indigne avale la dernière bouchée de sa salade. Va mettre sous clé tout objet dont elle pourrait faire un usage abusif dans les prochaines minutes pour le regretter par la suite (couteau, fourchette, talons aiguilles, scie ronde). Puis:

MÈRE INDIGNE -- Jean-Jules, la soumise, elle a deux enfants, tu te souviens?

JEAN-JULES, l'air inquiet -- Voui.

MÈRE INDIGNE -- Alors tu sais ce qu'elle te dit, la soumise? Elle te dit de terminer ta viande et tes patates pilées. TU ME NETTOIES CETTE ASSIETTE. IMMÉDIATEMENT. Ensuite, tu me débarrasses la table. Et finalement, tu vas réfléchir dans ta chambre. Pendant une demi-heure, le temps de te calmer. Après ça seulement, tu auras la permission de revenir ici. Tu devras alors m'expliquer EN DÉTAILS pourquoi tu as été puni et quelles leçons tu en as tiré. Compris?

JEAN-JULES, fixant le sol -- Voui.

MÈRE INDIGNE -- Voui QUI?

JEAN-JULES -- Voui... madame?

MÈRE INDIGNE -- Voilà. Bien. Très bien. Et ensuite, tu me raccompagnes à la maison. Il y a du ménage à faire.

Tuesday, July 10, 2007

Raviver la flamme, un fantasme à la fois

Les filles, faut que je vous dise.

Ce soir, je vais réaliser un fantasme de Père indigne.

Ce n'est pas rien, vous savez. Encore faut-il savoir que l'autre en a, des fantasmes, et si oui, lesquels. Moi, par exemple, si on me demande si j'ai des fantasmes, je dis "No sir, pas pantoute! Moi, des fantasmes? Oh, que non. Que du mépris pour ces séances parsemées d'uniformes de policier, de cuisinier, de voleur, de sa femme ou de son amant. Un T-Shirt troué me suffit pour atteindre l'extase (surtout si c'est moi qui le porte)". Ouais, si on me demande si j'ai des fantasmes, c'est ça que je réponds. Et il faudrait vraiment avoir de la finesse pour me tirer les vrais vers du nez et me faire avouer de quelconques rêveries torrides impliquant les deux Bob (le Bricoleur et l'Éponge), et Tinky Winky qui filme le tout avec sa Webcam.

Bref, tout ça pour dire que Père indigne en a, des fantasmes, mais pour les réaliser, encore fallait-il que je les connaisse. Et que je ne les aie pas déjà réalisés! Car rien ne sert de se cacher la tête dans le tiroir à slips: après 11 ans de vie commune, on a parfois l'impression d'avoir fait le tour. Tourniquet islandais: tchèck. Marinade tériaki: tchèck. Rififi martien, exploration sous-marine, prise du Yéti: fait, fait et même, dans certains cas que la pudeur m'empêche de préciser, refait.

Vous pouvez donc vous imaginer ma joie, aujourd'hui, quand j'ai eu la certitude que j'allais non seulement surprendre, mais encore ravir mon mari avec un de ces trucs auquel moi seule a l'audace de songer.

Vous voyez, Père indigne se plaint toujours qu'on ne trouve que des chaussettes dépareillées dans les tiroirs des filles. Parfois même, il lui arrive de s'écrier, la rage au ventre: "Ah, quand donc viendra le jour où elles n'auront que des chaussettes pareilles?" Alors aujourd'hui, quand je suis tombée sur les soldes chez Sears, mon coeur d'épouse a bondi: je pouvais réaliser le fantasme de chaussettes de mon mari adoré!

Je n'ai fait ni une, ni deux, ni même trois ou huit. J'ai plutôt acheté DOUZE paires de chaussettes i-den-ti-ques! Six pour Fille Aînée et six pour Bébé. Quelle hardiesse dans l'innovation! Quelle insolence dans la bravoure! Oui, j'avais conscience de repousser sans vergogne les limites de la décence. Mais je devais le faire. Pour mon couple.

Je me suis dirigée vers la caisse en essayant tant bien que mal de camoufler mes appétits de luxure, mais la caissière, qui a dû en voir d'autres, m'a regardé d'un air complice. Je compris qu'elle avait percé à jour mes intentions coquines. Qu'à cela ne tienne! J'ai assumé.

Et pour couronner le tout, les chaussettes, vous savez c'était combien la paire? Soixante-neuf sous. Ça ne s'invente pas.

Ah, ça, Père indigne, quand il va plier les vêtements ce soir, il va être fou de joie.

Sunday, July 08, 2007

Père indigne, détective privé (de dessert)

Père indigne -- Pour la fête de Fille Aînée, je lui ai acheté un album du Chat.

Mère indigne -- Hm.

Vous l'aurez remarqué, Mère indigne ne déborde pas d'enthousiasme. C'est que, dans sa mémoire, un souvenir reste à jamais gravé au fer rouge: Fille Aînée à 6 ans, un album du Chat sous le bras, lui demandant ce que le mot "couilles" veut dire. Le même souvenir, plus celui d'une amère discussion subséquente, se trouve également gravé à jamais dans la mémoire de Père indigne, qui s'empresse d'ajouter:

-- J'ai vraiment scanné le livre, cette fois-ci. Le pire que j'ai trouvé, c'est "sale couillon" et "couilles molles".

Mère indigne -- Oui, bon, pour ça on est déjà blindés. Mais quand même.

Père indigne, qui tient mordicus à distiller le belgian way of life chez ses filles -- J'ai bien scanné, je te le jure.

Mère indigne ayant accordé sa bénédiction d'un "Mouais, OK d'abord" gracieux, on emballa l'ouvrage et on n'y pensa plus.

On n'y pensa plus jusqu'à hier soir, alors que Fille Aînée s'est approchée de Mère indigne, son nouvel album du Chat sous le bras, et lui a demandé: "Maman, qu'est-ce que ça veut dire, 'bander'?"

Mère indigne -- Oh, là là! T'as vu dehors, y'a un geai bleu! Oh, là là, comme il est beau! T'as vu le geai bleu? Regarde, regarde, quel beau geai bleu! D'habitude y'en a chez Marie mais je crois bien que c'est la première fois que --

Fille Aînée -- Maman. Je t'ai posé une question.

Mère indigne -- Ah oui, euh, donc, "bander", disais-tu? "Bander", hum, comme dans "Il faut te bander les yeux", j'imagine?

Fille Aînée -- Non, attends, je vais te lire. C'est le Chat qui est sur les genoux d'une dame et qui dit: "À force de me caresser comme ça, elle va finir par me faire bander."

Mère indigne -- ...

Père indigne -- Je... j'avais pourtant bien scanné...

***

Après coup, je tiens à dire que Père indigne est bien bon de ne pas tenir de blogue, car il pourrait se venger en racontant comment, pour ses huit ans, j'ai décidé de Fille Aînée était assez grande pour être initiée à ces grand classiques de la chanson française que sont "Marguerite est malade", "Cupidon, veux-tu un fromage?" et "Le curé du village". Qu'est-ce qu'on s'amuse! Hum.

Friday, July 06, 2007

Faudrait vraiment la faire baptiser

Lors d'une séance intensive de rangement dans la chambre de Fille Aînée, Père indigne a retrouvé une petite carte offerte par le prêtre aux fidèles après la messe de minuit 2006. Fille Aînée l'avait agrémentée d'un dessin et d'un commentaire:


Dieu a dû être vachement ému.

Monday, June 18, 2007

Pourquoi nous rions de nos ados devant leurs amis

Samedi dernier, nous avons fait une magnifique promenade en vélo dans les rues du voisinage.

Enfin, quand je dis "magnifique", je parle pour tout le monde, sauf pour moi.

Bébé est confortablement assise dans son siège juste derrière moi, mais elle ne se contente pas d'apprécier le paysage lointain. Elle préfère ce qui se trouve dans son champ de vision le plus immédiat, j'ai nommé: mes fesses. Certes, je me plais à penser que si on plaçait les consommateurs devant une table où se trouvent, du côté A, le paysage lointain, et du côté B, les fesses de mémère, l'option B se révélerait être le choix d'un large pourcentage d'entre eux, surtout si le paysage est lavallois. Mais ce n'est pas un large pourcentage des consommateurs qui pourraient se permettre de faire la même chose que Bébé sans se faire taper sur la gueule.

Parce que Bébé, quand nous sommes à vélo, se fait un malin plaisir de tirer sur l'élastique de mon short ET de ma culotte, de se pencher sur le résultat et de s'écrier: "Ooooh, gô caca Maman!"

Ce qui donne, devant un défilé de banlieusards hilares, la conversation suivante:

MI -- Ben non voyons, Maman elle n'a pas de caca dans sa culotte.

Bébé -- Maman a gô caca!

MI -- Non, chérie. Maman n'a pas de caca dans sa culotte! Maman, elle va aux toilettes pour faire son caca.

Bébé -- É gô caca à Maman!

Père indigne -- Ha, ha, ha!!

MI, accélérant sur la pédale -- Maman. N'a pas. De caca.

Bébé -- Maman va sanzer coyottes!

MI -- Maman ne changera PAS ses culottes, ses culottes sont pro-pres!

Bébé, devant les voisins, je vous le rappelle -- É gô! É gô caca!

MI (c'est moi, et je m'énerve) -- C'est même pas vrai. C'EST MÊME PAS VRAI!

Père indigne ne rit plus, il s'étouffe carrément, frôle la mort, et moi j'ai des pensées méchantes à son égard qui impliquent ses parties génitales.

Bébé -- Maman va sanzer coyottes! Cousse à Maman!

MI -- Maman ne mettra pas de couches, voyons! Maman va à la toilette!

Bébé, survoltée -- É GÔÔÔ CACA MAMAN!!!

MI -- MERDE!

Bébé, toujours penchée sur ma raie -- MED!!

Sur quoi, je m'arrache à sa poigne de fer en me levant pour pédaler, et on rentre à toute vitesse à la maison.

Alors laissez-moi vous dire que Bébé, quand elle sera ado, elle va vraiment y goûter.

Friday, June 15, 2007

La taille de Jean-Louis

C'est l'été, n'est-ce pas, les filles? Et l'été, vous le savez toutes comme moi, c'est le temps des récoltes. On sème ici et là, on arrose fréquemment, on patiente un peu, et hop! Tout à coup, y'a Jean-Louis XXX qui se ramène en maillot au bord de notre piscine. (Au bord de la mienne, en tout cas.)

C'est beau, la nature.

Mais c'est aussi bizarre: Jean-Louis est arrivé pile-poil hier midi, alors que les deux filles étaient prises en charge par le système d'éducation et que Père indigne, par un hasard incroyable, était parti à L.A. contempler des femmes avec des seins.

Aussi bien vous le dire crûment, j'étais seule à la maison. Vulnérable? Très.

J'ai immédiatement voulu mettre mon invité à l'aise en lui retirant tous ses vêtements (sauf le maillot, auquel il avait pris soin de verrouiller un gros cadenas Master à la taille -- semble-t-il que c'est la mode; enfin, c'est ce qu'il m'a dit). Puis, je suis partie me changer.

Dilemme. Allais-je, en guise de maillot, porter mon slip de maternité qui avait tant remué JL le 31 décembre dernier? Combiné avec un soutif d'allaitement rembourré, j'aurais une allure d'enfer. Mais je risquais de le rendre totalement fou de désir et de le voir s'enfuir, sans nul doute par loyauté pour Père indigne. Non, si je voulais garder Jean-Louis pour l'après-midi, il me fallait être plus subtile. Aussi, j'ai simplement enfilé mon petit itsi bitsi mini weeny tout petit petit bikini.

En arrivant dans la cour, j'ai senti le regard de Jean-Louis glisser sur moi comme sur une peau de banane bien mûre. Plus bas, encore plus bas... oh, oui, plus bas! Oups, trop bas. Les sourcils de Jean-Louis froncèrent comme une robe de collégienne. Mais contrairement aux robes des collégiennes, la figure de Jean-Louis s'allongea.

JL -- Heu, tu ne crois pas que c'est un peu...

MI -- Un peu...?

JL -- Ben, un peu... long, par là?

MI -- Long? Tu crois?

JL -- En fait, je dirais même... touffu.

MI -- À ce point?

JL -- Honnêtement, on sent la négligence.

MI -- Ben, c'est parce que Père indigne est parti pour la semaine et je ne pensais pas que quelqu'un aurait l'occasion de voir...

JL -- Faudrait être aveugle.

MI, quelque peu offusquée, d'autant que Jean-Louis n'a pas apporté de vin -- N'exagérons rien. Tous les goûts sont dans la nature, et ça, personne ne pourra me dire que ça n'est pas naturel! En fait, je trouve que ça fait plutôt exotique: jungle, moiteur, cris aigus d'oiseaux en mal d'amour, animaux sauvages en pleine chasse... Ça ne t'inspire pas?

JL -- Pour dire la vérité, je préfère un terrain de jeux bien dégagé.

MI -- Holà! Mais c'est que ça prend du temps à entretenir, et c'est toujours à refaire! Et puis, Père indigne est assez indifférent sur la question. Quand l'envie me prend, il me donne rarement un coup de main... et pis toute seule, c'est moins motivant.

Dans l'oeil de Jean-Louis, une lueur soudaine d'intérêt.

JL -- Père indigne ne t'aide pas? Il...

MI -- Ben, parfois, il me regarde, mais j'ai l'impression que ça ne le branche pas vraiment.

Jean-Louis s'était mis à tripoter fébrilement son Master.

JL -- Heu, écoute, si tu veux, je pourrais... en toute amitié... pour t'aider... si t'es d'accord...

MI -- Ooooh... Tu ferais ça??

JL -- Ben... à vrai dire... je... c'est mon fantasme secret.

Sincèrement, les filles, qu'est-ce que je pouvais faire? Appelez-moi la Mozer Térésa des fantasmes, parce que je me suis étendue dans la chaise longue, j'ai respiré un grand coup, et là, dans la cour arrière de mon bungalow lavallois, j'ai laissé Jean-Louis tondre la pelouse.

Tuesday, May 22, 2007

Ma vie en dégueulirama

Prenons, si vous le voulez bien, quelques instants afin de nous écrier, tous ensemble, à l'instar de Dominique Michel: Y'a des moments si merveilleux! Car la vie nous réserve de si jolies surprises, surtout en compagnie de nos amis les enfants.

J'étais en train de préparer le souper. Rien de sanglant, rassurez-vous. Aucun légume n'était sacrifié sur l'autel de la soupe cathartique. Quelques olives venues expressément de la région de Kalamata, à l'Est de Rimouski (ou à l'Ouest, dépendamment du point de vue), eurent bien la surprise de voir leur chair malmenée par un couteau à la lame acérée; la sauce tomate a de ces exigences auxquelles nulle mortelle ne peut surseoir, surtout quand elle manque d'ingrédients intéressants.

Bref, de la moitié supérieure de mon corps, je préparais le souper, alors que la moitié inférieure, elle, s'affairait à tenir Bébé occupée. Plus précisément, Bébé jouait au souc à la corde avec ma jupe. Moi, je ne me serais pas laissée faire, mais ma jupe, elle, se laissait manipuler avec une complaisance hardie. La salope.

Inévitablement, vint le moment où Bébé découvrit que le dessous ma jupe constituait une excellente cachette. Elle s'y engouffra avec un plaisir manifeste. C'est alors que ma fesse gauche envoya à mon cerveau un signal d'alerte: quelque chose de mouillé, et de probablement visqueux, venait de s'y frotter. Et un autre endroit de mon cerveau se mit de la partie pour me rappeler que, deux minutes plus tôt, je n'avais pas cru bon de moucher Bébé pour la millième fois, afin d'éviter de l'entendre hurler pour la neuf cent quatre-vingt-dix-neuvième fois.

Les plus aguerris d'entre vous ont déjà compris: je me retrouvais, pour la première fois de ma vie, dans la fâcheuse position d'avoir de la morve au derrière.

La marche à suivre était claire. Je m'essuyai avec ma jupe, continuai à préparer le repas et espérai que je n'oublierais pas de prendre une douche avant de dormir.

Les enfants et nous. Y'a des moments si morveilleux.

Friday, April 27, 2007

Entre-deux

Il y a quelques jours, Fille Aînée est revenue de l'école la joie dans le regard.

-- Maman! Aujourd'hui, j'ai appris une nouvelle chanson. Tu veux la connaître?

-- Bien sûr, mon amour.

-- Je t'avertis, il y a deux mauvais mots dedans. Elle est drôle, tu vas voir: "Le ciel est bleu, la mer est calme, ferme ta gueule pis rame! J'peux pas ramer chuis constipé, va te faire engueuler!"

-- Rhhhhumpffffrrrhum. Dis donc. Des gros mauvais mots, ça. (Tousse, tousse.)

-- T'as entendu, hein? Y'a "gueule", puis "engueuler". Allez, je vais te l'apprendre. Le ciel est bleu...

Fille Aînée me regarda d'un air encourageant. Je poursuivis donc, d'un air faussement hésitant:

-- La mer est calme...

-- Ferme taaaaa...

-- Gueule!

-- Piiiiiis...

-- Rame!

-- J'peux pas raaaa...

-- Mer...

-- Chuis...

-- Con...?

-- Stiiii...

-- Pé!

-- Vas te faire ennnn...

-- En...?

-- Ennnn...

-- Engueuler!

-- Bravo maman! T'es vraiment bonne pour le par-coeur!

(Note au lecteur: Puisque la suite comporte des gros mots et dans le but d'épargner votre sensibilité, le reste du billet a été écrit dans un langage codé extrêmement difficile à déchiffrer. Ainsi, j'ai remplacé chaque lettre par la lettre qui se trouve 26 places plus loin dans l'alphabet. Bonne chance.)

Fille Aînée riait de bon coeur de voir sa maman si bonne élève, et moi, j'étais encore plus réjouie d'avoir réussi à éviter la question qui tue -- c'est-à-dire quelque chose comme "Maman, est-ce que ça existe le mot 'enculer'?" Ah, ah! Y'a pas à dire, la vie est bonne pour...

Fille Aînée -- Maman, est-ce que ça existe le mot "enculer"?

... Est bonne pour la déchiqueteuse.

Moi -- "Enculer"? Hum. Oui, ça existe. Mais c'est un très, très mauvais mot.

Fille Aînée -- Ah oui? Ça existe? Audrey, elle disait qu'il fallait dire "enculer" dans la chanson, pas "engueuler". Mais moi, moi j'avais dit à Audrey que ça n'existait pas, ce mot-là.

Moi -- Ça existe.

Fille Aînée -- Et qu'est-ce que ça veut dire?

Chienne, chienne de vie. Méchant, méchant Père indigne qui n'est pas encore revenu du boulot.

Moi -- Ça veut dire, heu, qu'une personne x met un objet p dans les fesses d'une autre personne y.

Fille Aînée -- Maman! Tu as dit "dans les fesses". C'est "sur les fesses" qu'il faut dire!

Moi -- Non non. J'ai dit "dans les fesses" parce que c'est dans les fesses.

Fille Aînée -- Dans les fesses?

Moi -- Moui.

Fille Aînée digéra d'information et déclara ensuite d'un air résolu: "Alors, c'est moi qui ai raison. C'est sûrement 'engueuler' qu'il faut dire à la fin de la chanson."

Oh, que oui, chérie. À tout le moins pendant les quelques prochaines années...

Tuesday, February 06, 2007

À la manière de Pierre-Léon: C'est ma tournée

Les deux filles étaient à peine installées sur le siège arrière du taxi que j'ai su que la ride serait dure.

-- J'peux-tu m'installer en avant? m'a demandé la grande blonde.

C'est pas que ça ne me tentait pas, mais c'est en avant que je tiens mes casquettes de rechange, pis c'est pas à moins 20 que j'étais pour commencer à les déménager dans la valise.

-- Pas de chance, ma belle. Faut que j'protège mes calottes.

Je suis pas certaine qu'elle ait compris, mais elle s'est assise en arrière sans trop rechigner.

L'autre fille, une brune, avait l'air complètement partie. Pour tout dire, c'est moi qui ai dû l'installer, puis l'attacher près de son amie. Elle avait les membres complètement mous, et me regardait la redresser puis m'acharner sur la courroie de sa ceinture comme si se faire trimbaler comme une poupée était parfaitement normal.

Je la sentais mal, côté pourboire.

-- On est-tu arrivées? a demandé la blonde.

-- Minute, papillon! On est même pas encore parties!

J'ai ri. Pas elles.

Je me suis vissé la casquette un pouce plus bas sur le front, puis j'ai démarré.

-- On est-tu arrivées?

-- Non.

Le silence était aussi pesant que mon pied sur l'accélérateur. La brune dodelinait de la tête. Reflétant les lumières de la ville, un filet de bave coulait sur son menton. Je l'ai pris en photo via le rétroviseur, puis je me suis dit: "Pourvu qu'elle ne soit pas malade avant de descendre."

-- On est-tu arrivées? de répéter la blonde.

-- Y'a du traffic. On en a encore pour une quinzaine de minutes.

-- On joue-tu aux devinettes?

Juste comme je me disais que j'aurais dû les laisser à leur party et aller me coucher tôt pour une fois, la brune a commencé à pleurer. Des grosses larmes, qui reflétaient la lumière rouge au coin de la rue où nous étions arrêtées. La blonde s'agitait. Elle regardait sa camarade sans compassion, semblait à bout de patience. Elle finit par me dire:

-- J'pense qu'elle veut un biberon, Maman.

J'ai fouillé en-dessous de mes casquettes. Je n'en avais pas habituellement, mais on ne sait jamais... Oui! Ma main a saisi un biberon tiède qui traînait à côté de ma collection de contraventions.

-- Tiens, donne ça à ta soeur. Pis j'veux plus vous entendre jusqu'à ce qu'on arrive à la maison.

-- On est-tu arrivées?

Rendues à Laval, Père indigne nous attendait sur le porche.

J'ai pas attendu le pourboire ni même le prix de la course. J'ai débarqué les filles, je suis repartie vers le Nord, pis j'ai couché dans mon char.